Promu(e) dans un nouveau poste de cadre ou manager ? Réussissez vos 5 et vos 50 premiers jours !
L’arrivée dans un nouveau poste est toujours stressante et délicate, en particulier en ce qui concerne un emploi de cadre. Outre l’appréhension de la nouveauté, il faut assimiler de nouvelles habitudes professionnelles, de nouveaux collègues, une ambiance de travail différente et parfois attentiste. L’inquiétude est aussi présente pour vos collaborateurs qui voient arriver un nouveau chef, avec probablement une personnalité et des façons de travailler différentes, et une crainte du changement par rapport à l’ordre établi.
Que vous arriviez avec un mandat défini, ou preniez la continuité de votre prédécesseur, votre arrivée marque un événement pour l’équipe. On n’a qu’une occasion de faire une bonne première impression, comme dit l’adage. Ces premiers jours sont donc importants pour appuyer une dynamique favorable dans le groupe de personnes dont vous aurez la responsabilité.
Même s’il y a peu d’erreurs qui ne soient pas rattrapables, autant partir sur de bonnes bases et faire en sorte que vos premiers jours soient les plus bénéfiques possibles. Comme beaucoup de choses, cela se planifie. Je vous propose ainsi d’organiser vos premiers jours en deux périodes complémentaires mais aux objectifs bien différents : les 5 premiers et les 50 premiers jours.
Les 5 premiers jours
Que vous arriviez de l’extérieur ou preniez la direction de l’équipe dans laquelle vous évoluiez déjà, votre rôle va changer et les relations avec vos collègues également, que vous le vouliez ou non. La distance sociale avec vos anciennes relations de travail quotidiennes va forcément augmenter avec vos prérogatives (le paragraphe sur « la solitude du chef » p65 dans le livre l’explique bien, ce n’est d’ailleurs pas une difficulté si vous savez l’identifier et l’exploiter). Ils auront probablement un peu peur de votre possible transformation d’attitude. Si vous venez de l’extérieur, l’inconnue est totale pour eux.
5 jours pour créer une atmosphère saine et performante
Si vous êtes familier de Soyez Chef Pas Manager, vous aurez compris que je préconise de créer une atmosphère professionnelle saine et constructive. C’est d’ailleurs l’essentiel de mon message : savoir être un chef qui prend soin de ses « troupes » pour les mener vers la réussite collective. Vous devez donc mettre à profit vos premiers jours pour donner une image positive et stimulante. Vos collaborateurs doivent être rassurés sur votre personne, vos principes et votre attitude. Ils doivent aussi comprendre votre vision et vos objectifs.
Ce sont deux axes bien distincts. Le premier les tranquillisera et leur permettra de désamorcer un stress tout naturel vis-à-vis d’un individu inconnu qui débarque dans leur entourage avec un éventuel pouvoir de nuisance. C’est autant d’énergie qu’ils n’auront pas à dépenser pour élaborer une protection préventive, et que vous gagnerez pour dans leur investissement dans les tâches du groupe. Le deuxième axe, comprendre votre vision et vos objectifs, leur donnera une amorce de prise en compte de votre dynamisme et votre niveau d’exigence. Même si vous n’avez pas encore précisément défini vos objectifs, vous pouvez expliquer votre façon de travailler et les valeurs que vous promouvez : rigueur, performance, précision, satisfaction client, …
Ces premiers instants sont effectivement importants pour fixer une première image de votre personne, la « bonne première impression » pour laquelle tous les regards sont braqués sur vous. Ils servent aussi à orienter les comportements et l’état d’esprit de vos collaborateurs. Et là, vous renversez l’exercice et commencez à braquer votre regard sur eux. Ces premiers instants sont des moments d’apprentissages essentiels pour votre équipe. Ils vous associeront durablement à ces premières prises de position, donc profitez-en et exploitez-les.
Comment ?
A vos collaborateurs vous pouvez aussi ajouter les partenaires extérieurs clés, et qui il sera utile de montrer votre personnalité et vos intentions. Rencontrez-les dans leur ordre d’importance. Le critère principal est souvent l’ordre protocolaire, auquel il faut adjoindre l’importance que vous souhaitez leur octroyer ou leur éventuel pouvoir de nuisance.
Concernant le gros du groupe, je conseille de préparer un discours simple mais construit. Outre le message oral qu’ils véhiculent, les discours représentent une vraie affirmation du chef dans son rôle vis-à-vis de l’équipe. Ils montrent que vous n’avez pas peur de vous présenter face aux autres et d’assumer vos fonctions. Je vous renvoie aux parties sur l’importance des discours et comment les élaborer (dans le livre p42 et p148).
Les 50 premiers jours
A la différence des 5 premiers jours dont le rôle est principalement psychologique et « politique », vos 50 premiers jours doivent être mis à profit pour établir vos mécanismes et leviers de direction effectifs. En langage militaire, il est question de mettre en place votre C2 : Command and Control. En d’autres termes, comment vous donnez vos consignes et ordres, et comment vous observez leur réalisation et les effets qu’ils produisent. Ces flux d’information sont nécessairement bidirectionnels. Dans un sens pour donner des consignes, dans l’autre pour s’assurer qu’elles sont bien comprises et que leurs effets correspondent à vos attentes. Il faudra ensuite corriger éventuellement les ordres pour ajuster les résultats.
Donner des consignes en imaginant que tout se passera comme prévu et sans observer leurs conséquences revient à conduire une voiture les yeux fermés. Si la route est droite, on peut toujours penser que la voiture ira tout droit si on tient bien le volant, mais la moindre perturbation sur la route fera dévier la trajectoire de la voiture et risque de vous envoyer dans le décor à plus ou moins brève échéance. C’est la même chose pour un manager : il doit mettre en place un système de capteurs et de retour d’information, pour suivre la performance et l’ambiance dans son groupe, et éviter le syndrome de la tour d’ivoire (voir livre p44).
Ce principe se traduit aussi par les concepts de roue de Deming, qui possèdent différentes déclinaisons suivant les milieux : PDCA (Plan Do Check Act, voir ici) dans le domaine du Lean Management ou OODA (Observation Orientation Décision Action, voir ici) dans le monde militaire.
Installer vos outils de Command and Control, sur tous les plans
Si vous suivez Soyez Chef Pas Manager depuis quelques temps, il ne vous surprendra pas que ces mécanismes de direction et contrôle ne se déclinent pas que sur le plan professionnel. On peut aussi les mettre en place sur des plans humains et organisationnels. De façon globale, vous avez au moins trois dimensions de direction et contrôle.
Une dimension purement professionnelle
Elle regroupe vos réunions de management et vos différents canaux de directives et de retour formels (« reporting » et indicateurs). Ceux-ci s’organisent généralement à partir d’une réflexion globale qui part de la vision à long terme, se décline en objectifs plus précis, eux-mêmes mesurés par des indicateurs de performance. Les risques liés aux activités sont également étudiés dans un plan de maitrise des risques. Ces démarches sont très classiques dans les organisations, vous pourrez les retrouver dans la troisième partie de mon livre.
Une dimension organisationnelle
Elle reste généralement invisible pour la personne qui n’est pas sensibilisée à l’optimisation organisationnelle ou à la qualité (formation Lean, modélisation des processus ou assurance qualité par exemple). Elle se mesure à la difficulté d’accès à l’information utile, aux temps de transaction ou d’échange, aux pertes diverses causées par une organisation perfectible. En effet, il est courant que certains effectuent des opérations répétitives voire inutiles sans chercher à les faire évoluer. Elles adoptent alors souvent une posture de fatalité, soutenue par leur propre consonance cognitive et des justifications résignées : « c’est comme ça », « il faut le faire », « c’est la procédure », « le chef a dit », etc. Ces éléments ont évidemment un impact sur la performance (point précédent) et sur le niveau de confort / frustration du groupe (point suivant). Ils peuvent évoluer via une démarche d’amélioration continue (sur les processus, les échanges, l’accès à l’information, etc.). Elle n’a bien souvent pas besoin d’être exhaustive, initier un cercle vertueux suffit généralement. Dans ce cas, la roue de Deming devrait s’auto alimenter en un cercle vertueux.
Une dimension informelle
Elle prend en entrée le niveau de pression et de stress auquel est soumis le groupe, par votre intermédiaire ou par le reste de la structure, et dont vous pouvez mesurer le résultat par les capteurs de signaux faibles que vous avez mis en place (voir la partie p216 du livre sur les signaux faibles). Ce sont des mesures souvent très indirectes et subjectives, mais essentielles car généralement corrélées à des taux d’erreur ou d’incidents en augmentation. Un surcroit de pression interne dans le groupe est généralement palpable au niveau des interactions sociales qui deviennent plus tendues, et des raccourcis dans les processus qui se multiplient, avec une augmentation des risques. Comme responsable des rites de votre équipe (voir le chef comme gardien des rites), répartissez des activités de cohésion idéalement liées aux moments importants de l’année, pour relâcher la pression et resserrer les liens du groupe.
Ex : réorganisation et simplification du stockage des données.
A titre d’exemple, dès mon arrivée dans un poste de responsabilité, je m’étais penché sur la réorganisation du stockage des données. Ce dernier représentait la clé de voute de l’efficacité de l’organisation, la compréhension de son fonctionnement et une source d’optimisation et de simplification des processus. La mise à plat de l’organisation des données a permis de mettre en lumière plusieurs axes d’amélioration. Trois services collationnaient les mêmes informations suivant trois processus redondants et tous imparfaits. Toutes les données de production ont pu être mise en commun de façon à ce que chacun puisse se les approprier. Les compte-rendus extérieurs ont été simplifiés voire supprimés en optimisant les outils de partage. Les très légers changements d’habitude qui ont suivi a permis d’économiser l’équivalent 0,5 ETP, d’optimiser certains processus et de lancer une dynamique de simplification contagieuse.
La mise en place concrète de tous ces processus ne sera pas développée ici (vous trouverez de nombreux exemples et conseils dans le livre). Votre organisation aura généralement déjà prévu un cycle de réunions et des mécanismes pour surveiller et organiser des indicateurs. A vous de les animer, en prenant en compte les deux dernières dimensions cités.
Conclusion
La prise en compte d’un nouveau poste à responsabilité se prépare et représente une occasion incontournable pour lancer une dynamique positive pour l’ensemble de votre mandat. A vous de mettre à profit les premiers jours pour vous placer le plus profitablement à la tête du groupe. Ne négligez pas les impressions que vous pourrez laisser, et de façon général les messages que vous passerez dans ces premiers instants. Soyez également méthodique, organisé et stratège dans vos premières semaines pour analyser les grandes lignes de votre équipe ou organisation, et vous doter des outils de surveillance et de pilotage qui vous appuieront pour lancer une dynamique positive et fructueuse.
A noter que l’échelle de temps des 5 et 50 jours n’a pas beaucoup d’importance et va surtout dépendre de la taille de votre équipe, de votre disponibilité durant ces premiers jours, de l’atmosphère et du mandat avec lequel vous arrivez. Il peut s’agir de 5 et 50 jours pour un groupe de plusieurs dizaines de personnes. Vous pouvez réduire à 1 et 10 jours pour une équipe de quelques personnes et étendre à 10 et 100 jours dans le cas de plusieurs centaines. Quant aux circonstances, si vous devez réorganiser tout un service suite à un événement particulier (changement de stratégie, difficultés, fusion), probablement anxiogène, je vous conseille de ne pas laisser trainer.
Merci encore de faire partie de nos lecteurs et à très bientôt !
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Vous pouvez également comprendre comment ces notions peuvent être exploitées en tant que manager ou responsable d’un groupe : découvrez le livre Soyez Chef Pas Manager. Il développe toutes ces dimensions purement humaines qu’un chef doit connaître et développer pour être à l’aise avec ses collaborateurs, dans toutes les situations.